📜 Le Régime de Santé par Guy Parat (vers 1459)
Le XXe chapitre traicte de la conservation et garde des membres genitoires.
Nous pourrions ycy conter plusieurs choses que l’en dit non pas seullement conforter les genitoires et membres servans a generation, mais tellemant les esvertue et conforte et efforte leur vertu, que a peine les femmes fondroient soubz les hommes. Mais, affin que ce present livre ne soit a aulcun occasion de pecher et cause de extenuer et debiliter son corps par plaisir charnel qui n’est que trop desiré, aussy pour ce que le phisicien se doit bien garder de non conseiller chose pour playsance ou santé du corps qui puisse estre en quelque maniere contre le salut de l’âme, je n’y mettray fors seulement aulcuns remedes pour conforter les membres servans a generation.
Affin que, par quelque accident et cause naturelle apres touchee, on estoit impotent de engendrer ou de estre en compaignee de femme, l’en y peut pourveoir et remedier par ces enseignemens. Et comme aucuns ne puissent habiter en femme par faulte de ventosité requis a femme a faire dresser la verge ou par deffaillir es esperitz neccessaires a fournir ceste oeuvre ou par non avoir semence, car
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les phisiciens dient ces troys choses estre necessairement requises a ceste besoingne, nous parlerons icy seullement des choses qui ad ce puent ayder, par bouller ou multiplier ventosité, esperitz ou semence. Et ne traicterons pas de ceulx qui ad ce deffaillent par ymagination ou par crainte. Et si aucuns n’ont povoir de besoingner par faulte des principaulx membres, ilz doyvent encourré a ce que avons dit par avant de la maniere de conforter les membres.
Touteffoiz, nous adjousterons icy que, estre en compaignee de femme, souverainement conforte les membres de generation, car, comme les mammelles des femmes alaictent mieulx et plus vaillent de layt par usance et coustume de allecter, mais que ce face moderament en maniere et heure convenable et pas descoustumer ne femmes ne pevent alaicter et ne se engendre plus de laict, pareillement il est des membres de generation, lesquels, comme ordonnez de nature charnelle, ilz sont renduz impotens par faulte de excercice. Et peut moult de foys advenir que, par retenir la semence corrumpue, les membres servans a generation et les vaysseaulx ou est la semence, se corrumpent et tout le corps de la personne s’en envenime, car semence corrumpue, selon la sentence d’Avicenne, est semblable a venin, car elle corrompt tout le corps. Pour conclurre doncques, nous disons que moderement user de compaignee de femme est une des choses qui moult conforte les membres de generation.
S’ensuit une question et doubte, a savoir si estre en compaignee de femme vault a conserver la santé.
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Aucuns veulent faux doubte et question s’il est necessaire avoir compaignie de femme. Et de ce, a esté debat et doubte entre les phisiciens a l’occasion du dit d’un philosophe nommé Epicurus qui affermoit, que Gallien racompte en son tiers livre de Tegni, que user de oeuvre charnelle n’estoit jamais prouffitable a santé et que le delaisser et desacoustumer ne faisoit point de mal au corps. Mais je me descens et me determine a ceste sentence, que user de compaignie de femme est chose convenable a santé, mesmement a ceulx qui ont le corps ad ce disposé.
Et la rayson est, car par ceste oeuvre la superfluité du corps, qui y est en trop grant habondance, est venue dehors. Et ne se treuve autre voye plus convenable a la purgier et repeller. Et sy elle n’est vuidee par ce moyen, elle se pourra pourrir et corrumpre et se convertira a chose semblable a venim dont s’en pourront ensuyvre plusieurs griefves maladies. Et finablement, en pourra venir la mort, car les superfluitez de la tierce digestion estant es membres, pechans en qualité non en quantité, soy purgier par excercice vain a soy faire froter. Mais la superfluité tres pure, ordonnee a generation, qui ne peche fors en quantité et habundance, n’est purgee ne expellee, si non par oeuvre charnelle. Et ne treuve l’en voye plus convenable a povoir faire vuider ceste matiere que estre en compaignee de femme.
S’ensuyvent, avec ce que dit est, plusieurs biens venans de ouvre charnelle, quant elle se fait moderement, car elle allegit le corps replet. Elle rent la personne joyeuse, le toult et oste soing et cure, conforte l’appetit, fait bien dormir et sauve et garit aucuneffoiz les passions et maladies venans de merencolie. Et qui plus est,
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si aucuns, par fort aymer quelque femme, estoyent en grant tristesse, la fureur et rage d’amour seroyt adoulcie et appaisee par ceste oeuvre, quoy qu’on ne joysse point de sa bien aymee. Et ceste forcenerie amoureuse se nomme de Avicenne illirici.
Et sont trouves plusieurs venerables religieux qui ont vescu en bonne santé sans user de compaingnie de famme. Je ose bien affermer qu’ilz eussent esté plus haitiez s’ilz en eussent usé moderament, car l’en ne treuve aultre plus convenable voye ne moien appellee la superfluité du nourrissement, appellee semence. Touteffoiz, je excepte et metz hors de ceste regle, les religieulx qui amaigrissent et chastient leurs corps, comme de boyre eaue et mangier racines et faire jeunes, esquelz lesditez superfluitez ne sont en trop grant excez. Et confesse bien que user de compaignee de femme n’est convenable a leur nature ne a leur profession et religion.
Item nous entendre que pluseurs inconveniens viennent au corps de la personne par soy abstenir de ceste oeuvre, mesmement quant on l’a accoustumee et que on a grant habundance de matere feminel, car par ainsy soy contenir, on devient fort pesant et frilleux. Et la matere se envenime et aucunefoiz les vapeurs qui emmennent, montent au cerveau et au cuer. Il advient aux femmes, quant elles ont la matrix trop serree et estroitte.
Et comme il soit ainsy que user de compaignee de femme fait de grans biens, aussy l’exceder nuyst a merveille. Et est cause de plusieurs dangereux inconveniens. Premir [sic], il debilite plus que quelque autre evacuation ou purge, destruit l’appetit, aparfondit et enfonce les yeulx, affoiblit le cerveau et tous les sens qui y sont
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situez. Et pour tant, ceulx qui ont le corps sec comme les coleriquez, se doyvent garder de ceste oeuvre come de leur ennemy mortel. Aussy font ceulx qui reviennent de maladie en convalescence. Item les maigres et de foyble complexion. Ceulx aussy qui ont petit ventre et subtil et les boyaulx estroitz. Et ceulx qui sont foybles de nerfz et qui ont les veines estroittes, doyvent fuir ceste oeuvre, car la continuation nuist aux nerfz, blece les yeulx, destruit la force du corps et fait les gens tost sembler vieulx. Et pour tant, ceste oevre aux vielles gens nuist.
Mais elle est bien convenable a ceulx qui ont le corps fort et plain de sang et les vaines amples et larges et qui sont d’une couleur vermeille et fort peuluz. Et mesmement leur sert en fin de adolescence, car ilz sont moult puissant ad ce. Par especial, se ilz usent de viandes fort nourrissans et qui multiplient et accroissent la matiere seminale et se ilz boyvent vin doulx et gros et dorment largement. Et devons entendre a ce que l’oeuvre charnelle soyt convenable a santé. Et celle que l’en a dit estre requise au regime de santé, il fault que nature le desire et appete. Et ne doit venir d’un appetit desordonné, esmeu par soy froter et grater ou par regarder belle femme ou par fort y penser. Mais doit ad ce esmovoir habundance de matere et d’esperit. Et ces choses viennent de parfaitte santé du corps.
Item l’en doit user de ceste oeuvre si moderement que l’appetit en soit esvertué et conforté, et que on sente plus legier et joyeux. Et n’est bon de estre en compaignee de femme quant on est fort plain. Et pour tant, on se doit esbatre incontinent apres son repos. Communement aussy, on ne doit prendre lors excercice du corps. Item l’en ne doit user de ceste
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oeuvre quant on se sent avoir grant fain, car ce seroit pour encourir fievre ethique qui seche la personne et lui fait perdre gresse et substance. Et, s’il advient que l’en se treuve en compaignie de femme tost apres son repas, l’en se doit apres doulcement pourmener affin que la viande puisse descendre et ne demeure negeant en l’estomac. Puis on puet aller dormir. Et pour choisir heure bien propre et convenable a ceste oeuvre, il fault prendre l’eure que l’en a acompliz la premiere et seconde digestion et que la tierce digestion est ja commencee. Et comme aucuns dient, ce avient communement apres le premier somme. Et, si au commencement de la nuyt, aucun estoit en ceste disposicion et estat, et seroit heure tres propice a besoigner, car on dormiroit apres largement. Et par dormir se reforceroit la vertu naturelle et la semence de l’omme se ficheroit mieulx en la marrix. Et adonc la femme en conceveroit plus legierement et ceste oeuvre moins affoibliroit l’omme. Item celui qui veult avoir compaignee de femme ne doit estre fort eschauffé, ne fort refroidé, combien que apres grant challeur, il nuyse moins que apres grant froideur. Item l’en se doit garder de ceste oeuvre apres ce que on est vuidé fort et purgié, comme apres vomissement ou fluxes et cours du ventre ou saignee et apres grans labeurs et movemens du corps; apres aussy fors couroux ou grant tristesse et semblablement apres grant joye. L’en se doit aussy garder de estre en compaignee de femme lorsqu’on a appetit d’aler en chambre ou faire urine, car selon la sentence de Avicenne, ce nuiroit au corps. Item on ne doit point en ceste oeuvre retenir la semence, car ce bleceroit et froisseroit l’un des mem-
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-bres genitoyres que les phisiciens appellent les oeufz de nature.
Au sourplus, il est moult de manieres de user de oeuvre charnelle qui sont contre la loy de Dieu et les bonnes meurs, que les Crestiens doyvent garder et qui sont tres desconvenables a notre santé et font grans maulx a notre corps. Comme si la femme montoit sur l’omme. Pour certain, ceste maniere n’est pas seulement contraire au salut de l’âme, mais aussy est tres dangereuse a la santé du corps, car de ce faire, pevent venir frondes et enfleures a la verge et a la vessie par la difficulté de l’issue de la matere seminale et le travail qui y est. Si, est lors a doubter que de la partie de la femme ne descende aucune chose en la verge de l’omme. L’en doit doncques fuir et abhominer ceste maniere de faire.
Et, plus convenable maniere de estre en compaignee de femme pour avoir lingnee, est d’en user lorsqu’elle est parfaictement purgee de ses fleurs et qu’elle n’est trop chargee de viande, ne fort affamee; qu’elle n’ait aussy trop froit ne trop chault. Et est bon aussy qu’elle soyt au commencement de la tierce digestion et que les deux premiers soient acompliez come nagueres a esté dit de l’omme. Et doit l’en choisir heure que l’omme et la feme aient naturel desir de soy trouver ensemble. Et que cestuy appetit ne soyt acquis par regars ou atouchemens. Et se doyvent joindre non pas de costé mais tout droit et tant continuer le jeu que la semence soit bien digeree. N’y doyvent pas touteffois si longuement sejourner et attendre que la matere se corrumpe. A l’omme adoncques estant en besongne et qui a femme de bonne com-
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-plexion, doit doncques longuement alonguer l’esbat et manier les tetins et dire des amoureux et gracieux motz. Et la rencontrer sens besoigner au vif jusques ad ce qu’il appercevera sa compaigne fort desirer la chose. Et ce pourra [-t-] il congnoistre quant il la verra parler en blandissant et les yeulx in petit devenir rouges et son alaine eslever et imposer comme en souspirant. Lors, il se doit emploier et ouvrer a cestes en la souefvement maniant et frotant des dois sur le ventre et les ainnes, car illec est le jeu et plaisir et delectation d’elle. Et puis doit laisser sa semence au lieu deu. Et n’est mie bon que l’omme accomplisse son delict avant la femme mais le doyvent faire ensemble ou la femme ung petit davant. Et lorsque les semences se partiront, l’omme se doit joindre a la femme le plus serrement qu’il puet, et ne doit descendre incontinent, mais se doit tenir jusques ad ce qu’il voye l’alaine d’elle estre coye et amoderee et que les genitoires et noux de la marris ne se moveront plus. Et adonc, il doit descendre. Et elle doit demourer en ce point l’espace d’une petite heure. Et si elle puet dormir en telle maniere, la chose en vauldra mieulx pour concepvoir. Et si elle se veult tourner, il vault mieulx qu’elle se couche sur le droit costé. Et ycy sont les parolles de Avicenne, ja soyt ce qu’il les die ung petit obscurement.
Or retournons a present a notre principal propos, c’est assavoir a desclarer les choses qui pevent conforter les membres genitoires des hommes et leurs membres servans a generation. Et premier, il fault entendre que, avant qu’on vaille quelque remede et prevision en ceste ma-
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-tiere, il fault bien enquerir qui est la cause du deffalt en celle oeuvre, car, comme dit Avicenne, il est impossible de curer et guerir aulcune maladie, si avant on ne la congnoist. Et ne doit personne penser estre layt ou deshonneste a ung phisicien parler de ses besongnes, car Avicenne tesmoingne que les phisicien ne doit reputer a laidure traicter de la quantité et grandeur de la verge. Aussy, il est certain que l’oeuvre de generation est empeschee par tres petite cause. Sy, doit le phisicien franchemant et sans vergoingne parler et discerner de la science et matiere subjecte a ladicte science.
Oultre ce doncques que dessus a esté dit, nous devons savoir qu’il est bon en ce cas mangier de gras chebris masles avec ciches et ongnons sans frire, car friture seche fort et ne nourrit gueres. Il est bon aussy user de gelines jeunes, de pigeons bien gras et de oeufz moletz, et mesmement quant on mect es oeufz de la pouldre de cynamoine et d’une appellee galinga, et que tout ensemble destrempe. Aussy, ad ce ser user de oeufz et de moynetz et de leur char qui est moult chaulde. Item il est convenable manger naveaux tant larges comme longs et aguz. L’en a aussy trouvé en ce cas grans bien et aide a user de cervelle de menus oyselletz, mesmement de moynetz, et aussy mangier du ris et du lait. Et a ce pareillement vault le cresson des jardrins, que nous appellons rocquet. Et encores est meilleur le commun cresson, croissant es fontaines. Mente aussy est bone et confortant en ce cas et en user fait l’omme tres puissant ad ce. Item l’en dit que, si aucun accoustumoit a mangier moinetz, boire lait en lieu de vin, qu’il auroit tousjours la verge dressee et seroit bien habundant en matiere seminal.
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On loue aussy moult user de jeunes annettes pour bailler largement semence. Et ad ce pareillement vallent grains de pin. Et dit l’en que anis est moult bon en ce cas.
S’ensuyvent les confections a ce servans. Premierement la confection nomee dianbra, ou il y a de l’ambre. Et Avicenne met et descrit, ou commencement de son cinquiesme [fen], confection nomee dyasatirion, qui est faicte d’une herbe appellee satirion et la mect Nicolas. Le ellectuaire fait d’un petit poisson nomé stuice. Et le electuaire des roys. Ad ce aussy vault la grant triffere que Avicenne mect. Et la triffere sarrasmoyse dont Mesué parle au commencement de son Antidotaire, ou il mect les receptes des confections et plusieurs autres choses servans a ceste besoigne dont nous ne toucherons a ceste besoigne pour cause de briefveté.
Mais, pour ce qu’il est plusieurs venerables personnes voulans mener vie chaste, qui desirent bien povoir vivre haitiez et en bonne santé, je adjousteray a ce present chappitre aucuns enseignemens, par lesquelz ces sainctes gens pourront, en gardant leur bon propos, soy maintenir en santé. Et n’est point a croire que une personne puisse venir sans ceste oeuvre charnelle. Et l’experience monstre le contraire par les vierges qui jadiz ont esté et sont a present vivans. Et aussy ce apparet, par ce que plusieurs anciens phisiciens ont traitté du regime de santé, qui n’ont fait quelque mention de ceste oeuvre, quoy qu’elle soit, comme j’ay dit par avant, bien convenable a la santé d’aucune personne particuliere, et de tous poins necessaire a la conservation et genre humain, comme dient les philosophes.
Pour proceder doncques en ceste besoigne, nous traicterons premier des choses contraires et opposees a ceste oeuvre. Et le premier
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enseignement se prendra de la coustume, car descontinuer de ceste besoigne est une des choses qui plus aide a vivre chastement, comme dessus a esté dit des femmes qui allaitent. Touteffoiz, il nous fault entendre qu’il n’est pas seur a ceulx qui sont de long temps accoustumez a ceste oeuvre, soudainement ce delaissé en tout. Mais doyvent petit a petit muer ceste coustume, car changer a coup ce que l’en a de long temps accoustumé, est chose fort nuysante et dangereuse, come dient les acteurs de medecine. Il est bon doncques petit a petit ce delaisser et passer sa fumee avec quelque laide vielle, de qui la compaignee et le regard soit abhominable. Et quant on est en besoigne, on doit considerer la laidure et deshonnesteté en soy du fait et que ceste oeuvre est plus bestial que humaine. Item que l’entendement et rayon de la personne se noye et pert pour l’eure pour ceste chose faire. Doit aussy considerer qu’en ce, l’en n’aquiert et aprent quelque vertu. Et que la personne en est estrangee et destroitte de plusieurs bonnes oeuvres, car, comme dit le philosophe, la fumee emble et actrait furtivement le cuer du saige. Et par bien ententivement penser aux choses surdictes, l’omme se pourra plus aisément contenir.
Item devons savoir que, aller a la chasse et aucuns autres jeux, passe tristesse et merencolie. Et pour chasser grans humeurs et acquerir grans dignitez et semblables besoignes, servent a rendre les gens continens et chastez. Ad ce aussy, faire soy seigner, soy estuffer souvent d’estuffes seiches et prendre grant travail et fort excercice, car ces choses purgent et conservent la matere seminal et empeschent qu’elles multiplient et croissent ou corps de la personne. Item ceulx qui vi-
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-vent chastement, se doyvent garder de toutes viandez qui puent aguillonner a ceste oeuvre, par multiplier la semence, ou par esveiller ou aluminer la chaleur naturelle, ou par accroistre et ensembler les ventosites es membres servans a generacion. Et quelles soient les viandes de quoy il doit user, nous l’avons nagueres declaré.
Item les choses qui s’ensuyvent dont les aucunes sont froydes, les autres chauldes, seichent la matere seminal. Les froydes sont comme lentilles et eaue de lentilles cuicte avec sa semance de canebuise et de nenufar, qui est une herbe croissans es viviers sur l’eaue et s’appelle pré de cheval et pourte la fleur blanche, cuictes aussy avec la semence de coriandes et de laictues. Item ad ce sert boire du plus cler du lait de beurre, qui est come naige. Et doit estre sans boyre fort aigre. Est bon aussy user de vin aigre et de la semence de pourcelaine. Et toutes ces choses susdictes seichent la matiere et alterent et refroident la chaleur esmouvant et incitant a ceste oeuvre. Et en puet l’en faire de pouldres ellectuaires ou bruvaiges dont pourront user ceulx qui desirent vivre chastement. Item il est bon en ce cas oindre sé rains et les membres servans a generation de huilles froides et seches comme de l’uille de jusquiam, qui est une herbe faissant dormir, ou de huille de olive, car ce seiche la semence. Aller aussy piedz nudz amoindrit et abaisse la matere seminal; fleurs de liz; la semence de roses; l’erbe appellee agnus castus, que nous nommons aignaulx chastez et croist en hault païs; la semence aussy de ceste herbe y est bonne. Et dit-on communement, se ung lict estoit couvert de aigneaulx chastez, celui qui y dormiroit,
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perdroit l’appetit de ceste oeuvre. Et comme raconte Averoys, les de Salerne usoient de ceste medecine es jours des grans festes et haultez solennitez, affin que lors, elles s’escontenissent plus aisement. Item il est bon en ce cas user d’une herbe appellee calamentum, qui resemble a marjolaine. Est bon aussy de user de merde de congnin et d’une gomme chaulde nommee eufobium.
Item il est bon plungier les membres de generation en eaue tres froide, car ce restraint et oste le desir de ceste besoigne et oeuvre. Et mesmement si ce fait lors que, par nature ou par appetit desordonné, l’en se sent fort aguillonné et ardant d’acomplir sa voulenté. Item il est convenable en ce cas lier sur les rains une plate de plomb bien deliee et pertuisee bien menuement; qu’il soyt ointe de quelque huille froide et seiche; et la doit -on souvent porter. Ceulx aussy qui se veullent contenir et abstenir de ceste oeuvre, ne doyvent user de viandes fort chauldes et moytez, ne moult nourrisans. Mais leurs viandes doyvent estre de petit nourrissemant, tandant et tirant sur le froit et sec. Et ne doyvent ces viandes avoir en elles ventosité, car ce esmeut et incite a oeuvre charnelle. Et mesmement, quant, en ces viandes, avec la ventosité est challeur et moitteur, comme nous voyons es ciches, qui sont chauldes et moittes et plainez de ventositez. Et semblablement est de naveaulx, de febves, frasees et pastinaque, qui est une herbe aians rouges racines.
Item ceulx qui veullent vivre chastement, se doyvent acoustumer a veiller et moins mangier qu’ilz ne souloient. Et jamais ne doyvent estre oyseux, mais se doyvent occupper en quelque besoigne honneste, soyt par vacquer en estude ou par entendre et penser
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quelque autre besoigne, car ces occupations font oblier le desir de ceste oevre. Oysiveté nourrit ce vice et plusieurs aultres pechez. Ceulx doncques qui se veullent contenir tellement, doyvent ordonner leur maniere de vivre en quelque heure ne passe sans exploit, ne besoigne, fors ycelle qui leur est neccessaire a dormir. Item nous devons savoir que plusieurs voulans vivre chastement, se sentent fort debilitez et affoibliz au cuer et a l’estomac, par delaisser ceste oeuvre. Si, fault adviser a povoir conforter les membres par mangier et boyre aulcunes medecines ou par user d’emplastres propres a conforter le cuer et l’estomac, lesquelles soyent froydes, chauldes ou attrempees, selon ce qu’il semblera estre expedient, actendue la complexion et eage de la personne et la condition du temps, esqueulz se prendront ses medecines. Nous avons aussy traicté de ce qui vault singulierement a conforter le cuer.
Item je loue que ceulx qui se veullent abstenir, prengnent usaige et coustume de faire travail et excercice des membres d’en hault, comme en jectant la pierre. Et generallement, ils se doyvent usager a tout ce faire ou les bras et la poittrine se puissent mouvoir et travailler. Et cestuy excercice des membres d’en hault leur est plus que celuy des membres d’en bas, car les superfluitez des membres d’en hault se consumment et purgent par cestuy excercice, et ne se multiplient en eulx par delaisser l’oeuvre charnelle. Et aux membres d’en bas, l’en doyt appliquer oignemens et emplastres ayans vertu de seicher la semence, lesquelz soient fraiz ou secz ou chaulx et secz, comme on verra plus convenable, selon la complexion de la personne. Touteffoiz, regulierement, il vault mieulx que ces choses declinent et
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tirent a froideur et secheresse.
Item devons entendre que ceulx qui veulent vivre chastement, doyvent plus user de saignees que de purgations et medecines laxatives, car il est a doubter que les medecines laxatives ne facent descendre la matere aux parties d’am bas. Et entre toutes les saignees, celle qui se fait es vaines par dedens le pied soubz la cheville, est la plus convenable, lors que l’estomac et le cuer se affoiblissent de delaisser ceste oeuvre.
S’ensuyvent les choses ayans singuliere d’empescher l’oeuvre charnelle et de deffendre que la verge ne se dresse : premierement l’erbe qui se appelle agnus castus, dont nous avons parlé dessus; item aulx; caiz; aurone, qui est une herbe emere; et canfre en quelque maniere qu’elle soit prinse, vault moult en ce cas; et mesme le cerfueil y sert, comme dit Averroys; item l’erbe croissant es luis, que les phisiciens appellent sicuta; et pommes de Grenade restraignent l’appetit de luxure, selon la sentence des anciens phisiciens; Albert aussy dit que jaspe a telle vertu; aussy a le saphir et l’esmeraude; item il est bon en ce cas user de laictues et de pourcelaine; et porter sur soy du plomb; et plusieurs autres choses y servent, qui se treuvent aisement es communs livres de medecine.