📜 Le Régime de Santé par Guy Parat (vers 1459)
Des fruitz.
Selon la sentence d’Avicenne, il n’est pas bon de user des fruitz par maniere de viande, car le nourrissement qui en vient communement, n’est point louable, car il engendre sang qui se pourrist legierement. Et toutes foiz, pour ce que plusieurs estans en bonne santé, ont accoustume user de fruitz, esperans y trouver autre bien que nourrissement, nous concluons qu’on n’en doit point user continuellement, ne les prendre en grant quantité. Et assignent les acteurs quatre raysons pour quoy l’en puet user des fruitz, puis qu’on est en santé.
La premiere est pour adoulcir et mitiguer la colle pour estaindre la challeur du sang et pour amoistir et refreschir le corps, se les fruitz ad ce servans, sont ceulx qui sont frois et moistes; mesmement quant ilz sont frais et nouveaulx, comme prunes et souverainement celles de Damas, pesches, figues. Et telz fruitz sont convenables en esté et autompne, car en ce temps, les gens sont plus secz et plus enflammez et seigneurisent plus en eulx les humeurs coleriques. Et pour tant, user des fruitz est plus convenable aux colleriques et aux sangins que aux aultres complexions; plus aussy aux jeunes gens que aux vieulx. Mais nous devons icy savoir que melons, citrons et concombres sont de tres dure digestion et leur humeur est disposee a pourreture et engendrent fievres longues. Touteffoiz ces fruitz estaignent la soif et actrempent la challeur du sang. Item devons savoir que l’en ne doit prendre ses fruitz susd. trop vers et mal meurs, ne aussy trop vieulx. Et ce doit estre generallement gardé en touz fruitz, car il en est aucuns, quant ilz sont devenus noirs, ilz sont plains de yraignes ou de vers qui les manguent. Et telz fruitz ne sont lors aucunement bon, car ilz disposent les humeurs en corrupcion
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et en ceulx qui en usent, engendrent appostumes coleriques, comme charbons, endragues et buloues que aucuns appellent « joiaulx de Notre Dame ». Et de ceste condition sont moures quant on les laisse trop longuement sur l’arbre. Et pareillement en sont une maniere de grosses cerises que aucuns appellent gasconnes. Et, quant l’en apperçoit lesd. fruitz ou autres quelconques estre tant meurs que les yraignes les manguent, on n’en doit aucunement user. Et pour regle generalle, les phisiciens dient qu’on ne doit user des fruitz ou les vers soient.
La seconde cause pour quoy il est bon aucunefoiz user de fruitz, est pour avoir le ventre lasché, car aucunes gens sont de nature, ou par quelque accident, plus serres que bon ne leur seroit. Et ceulx puent bien user d’aucuns fruitz faissans aller a chambre, comme sont figues, raysins, prunes, moures, cerises bien meures et pesches molles. Et doyt l’en prendre ces fruitz a entree de table avant toute autre viande. Et est bon non mangier autre chose incontinent apres ces fruitz, mais doit l’en ung petit surseoir et actendre et boire sur aucun potaige ou vin trempé ou eaue froide.
[Raisin]
Item nous devons savoir qu’il sont trois manieres de raysins. Les ungs sont meurs; les autres sont secz, comme sont raysins de Quaresine; les vers qui point ne sont meurs, serrent le ventre et rendent la challeur de l’estomac et pour tant, ilz sont moult bons aux aians le flux de ventre de matere colerique; les raysins meurs venans freschemens de la vigne et mesmement les blancz, quant on les mangue sans les grains et sans l’escorche de dehors, laschent le ventre et baillent plus grant et meillour nourrissement que les autres fruitz, comme font aussy les figues.
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Il est vray touteffoys qu’ilz engendrent ventosites et enflent et font mal au ventre. Et pour ce, il est bon les prendre deux ou trois jours en quelque lieu nect, car lors, ilz nourrissent mieulx et si ne enflent pas tant. Ceulx doncques qui ont l’estomac plain de viandes ou de mauvaises humeurs, ne doyvent aucunement mangier vendenge[1], mesmement quant elle est fresche. Et par especial, n’en doyvent user sans les grains, car ceste viande se corrompt legierement en l’estomac qu’elle ne treuve pas nect. Et si, y corrompt l’autre viande. Et pareillement est des autres fruitz qui laschent. Mais raysins secz et confiz, comme sont raysins de Tarse et de Karesine, approuchent plus a challeur et confortent l’estomac et le foye et si oeuvrent et destouppent les oppillations et dient aucuns que le foye s’en engresse, mesmement quant les grains sont ostez.
Des figues.
Figues fresches et nouvelles nourrissent tost et vont legierement de l’estomac au foye. Et comme dit Gallien en son livre qu’il fist de la cure de la gannisse, elles engendrent ventositez. Et selon Avicenne, elles estendent la soif. Et entre les figues meures, les blanches sont les meilleures et puis les rouges et au derrenier des noires. Mais les figues seiches enfflent moins et oeuvre plus les oppillations et estouppemens, et engendrent sang subtil. Item figues confitees mundiffient et adoulcient le poulmon.
Des moures.
Les moures des arbres et les meures des hayes, quant elles sont vertes et mal meures, serrent
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le ventre et ont vertu stiptique et restraignent. Mais celles qui sont meures laschent et declinent a moisteur et se doyvent mangier apres autre viande, car elles se pourroient corrumpre. Et pour tant, ceulx qui craignent que leurs humeurs ne se pourrissent, ne doyvent user de moures de hayes, puis que ces fruitz sont meurs, car ilz disposent a fievre. Et pour ce, je ne loue point que gens estans en fievre ou qui se sentent ad ce enclin, usent d’iceulx fruitz.
Des prunes.
User des prunes bien meures, est moult accoustumé es Ytalies, mais les vertes et mal meures n’y sont point en coustume. Et doit-on choisir les noieres longues et dures qui n’ont gueres de char et qui ont la pellure bien tenue et ne doyvent estre toutes doulces, mais leur doulcer doit estre avec une sevrete tirant sur sicate et ranceur. Et telles sont les prunes de Damas. Et ceste maniere lasche le ventre et si refroidit et baille moisteur. Et pour tant, elles sont moult bonnes aux febricitans. Item, au sourplus, il est aultres plusieurs manieres de prunes qui gueres ne sont a louer. Item les prunelles sauvaiges rondes qui croissent sur les buissons et s’appellent d’aucuns fourdines et serrent le ventre, et quant elles sont vertes, aucuns en prennent le jus, qui nomment acacia, lequel sert moult en medecine. Item qui veult user des prunes susdict. pour se refreschir et avoir bonne chambre, il est bon les mettre en eaue froide une heure et demye, car lors, elles refroidissent la colle qu’elles treuvent. Et devons savoir que prunes freches et moistes alterent
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plus le corps et plus laschent le ventre que les seches, et si baillent petit nourrissement et engendrent plus de superfluitez. Et les seiches confortent mieulx et nourrissent plus, comme dit est des prunes. Pareillement doit estre entendu des cerises. Il est vray touteffoiz, que la moisteur des cerises et plus subtille et moins visqueuse. Et pour tant, elles nourrissent mieulx que les prunes.
Des pesches.
Les pesches engendrent humeurs qui se pourrissent legierement, mais elles confortent l’appetit. Et pour tant, on ne les doit point manger a l’issue de table comme font aucuns, car lors, elles corrumpent l’aultre viande. Mais on les doit prendre au commencement, comme dit est des prunes. Et lors, elles se digerent bien et si confortent l’estomac colerique et le refroident et refreschissent. Et devons savoir que leur fleur et oudeur sert contre la passion cardiaque, qui est douleur du cuer, car elles confortent moult la bouche de l’estomac et ont merveilleuse proprieté a deffendre la puanteur venant de l’estomac. Et si aucun aiant l’estomac froit ou foyble ou remply de mauvaises humeurs se veult desjuner de pesches, il est bon qu’il boyse sur ung petit de bon vin viel souef flairant, car ce les fera digerer plus aisement et corrigera leur malice. Et deves savoir que pesches meures laschent le ventre et les vertes et mal meures le serrent. Item les pesches qui se despartent et rompent legierement, vallent mieulx et sont de meilleur digestion que les dures, car elles ne sont pas si moistes ne si visqueuses.
Au sourplus, comme dit a esté que l’en se doit garder de user de plusieurs et diverses viandes, aussy
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doit-on eschiver diversité de fruit. Et pour tant, on doit mengier ensemble figues et vendenge, semblablement est des aultres fruitz.
Des crisomilles et avant-pesches.
Les crisomilles, qui sont petites pesches seches et jaunes par dedens et s’appellent communement avant-pesches, sont moult semblables aux pesches en maniere et temps de les prendre, ja soit ce qu’elles ne se corrumpent pas tant legierement et ne deviennent pas si tost aigres. Et combien que Gallien les loue, Serapion touteffoiz les desprise et dit qu’il ne croit pas qu’il soit plus froide viande et plus contraire a l’estomac que l’advant-pesche.
La tierce cause pour quoy aucuns usent des fruitz, est pour serrer et restraindre le ventre, car aucuns l’ont de nature ou par quelque accident plus lasche que besoing ne leur est. Et telz gens pevent user d’aucuns fruitz restraignans, comme sont coings, pommes, neffles et une autre maniere de neffles, qui s’appellent sorbes, car ces fruitz, prins a entree de table, serrent et constipent. Et touteffoiz, l’en ne doit mangier ces fruitz en grant quantité, car ilz sont de grande et longue digestion et nourrissent la viande. Moures prinses pourrent estre plus tost digeree que les susd. fruitz et demourroit en l’estomac oultre le temps deu. Et par ce, la digestion pourroit estre corrumpue. Qui veult doncques prendre d’iceulx fruitz, a ceste fin, il les doit mangier a entree de table et en petite quantité. Mais si on desire le ventre avoir lasche, on les doit mangier en la fin du repas, et entre les dessusditz fruitz, qui ont stipticité et ranqueur et la ponticité,
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qui est aigreur avec doulceur, ils sont de bonne oudeur, par quoy ilz confortent moult l’estomac et les autres membres principaulx. Et qui les veult bien cuire, il les doit envelopper d’estouppes et les mettre soubz les charbons ou soubz cendres chauldes. Et puis, doyvent estre rompuz en pieces et mis en bon vin souef flairant, car ilz nourrissent mieulx en ce point et moins griefvent et chargent l’estomac. Et en sont plus aisez a digerer. Et ceulx qui ont l’estomac foyble, en doyvent user en ceste maniere. Mais les coings crus ont plus grant stipticité et ranqueur et sont de plus dure digestion que les cuitz[2]. Et pour tant, ceulx qui ont l’estomac froit et foyble, n’en doyvent aucunement user.
Des poyres.
Les poires, de tant qu’elles sentent mieulx et plus ressemblent aux coings en substance, saveur et couleur, elles sont plus convenables a l’estomac. Et les poyres, qui moins ont de couleur, nourrissent moins que les autres. Et sont plus propres a serrer le ventre, si on les prent au commencement du mangier ou a le lascher si on en use a fin de table. Et devons diligentement noter que poires mangees a jeun, engendrent la colerique passion bien forte et non curable. Et pour tant, si d’aventure on le mangue a jeun, l’en doit boyre dessus ung petit de bon vin viel bien sentant, comme dit a esté des pesches.
Des pommes.
L’en doit mangier pommes doulces a l’entree ou a l’issue de table. Et elles nourrissent mieulx que les autres pommes qui sont su-
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-res ou pontiques ou stiptiques. Et ces pommes pontiques sont semblables aux coings et poires en leur opperation. Et en doit l’en user pareillement. Item les pommes qui sont de bonne oudeur, confortent le cerveau et le cuer. Et ce, souverainement est vray de pomes sures et pontiques. Et les pommes doulces ne sont gueres bonnes aux coleriques, car elles se convertissent legierement en colle. Et devons savoir que les pommes ont une mauvaise proprieté, car elles engendrent ventositez en la seconde et tierce digestion. Et comme dessus a esté conté que les saiges afferment que user de pommes affoiblissent les nerfs, et Averrois conte que user coustumierement des pommes puet engendrer la maladie de ptisique et secheresse, qui est quant le poulmon est entamé, sont cause aussy de ethique, qui est une fievre chaulde entre cuir et char et maine la personne a secheresse. Et sont les pommes cause aus dictes maladies, par ce que les ventosites qu’elles engendrent, ont proprieté de bruller et alumer les conduiz et arteres du poulmon. Et ce aussy tesmoigne Avenzoar.
Des neffles.
Entre touz les fruitz dessus nommes, les neffles et sorbes vallent moins a mangier et sont moins convenable pour nourrir. Et ce appert par l’austerité de leur goust et la durté de leur substance, quant mesmes elles sont meures sur l’arbre. Et pour tant, on en doit moins mangier que des autres fruitz dessus nommes. Et en doit l’en plus user en maniere de medecine que par force de viande. Et ces fruitz ont vertu stiptique en restraignant, et pour tant, ilz sont bons
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a ceulx qui ont le flus de ventre. Et pour ce que les neffles ne demanguent jamais a peine sur l’arbre asses bonnes a en user, il est bon, avant qu’on les mangue, les laisser parer et ramollir. Et lors, celles sont plus playssant au goust et si restraignent et serrent moins.
Et, si aucun veult veoir plus au long combien l’en doit user de fruitz pour soy maintenir en santé, il lise Avicenne en son IIIIe Livre des viandes, et Gallien au quatriesme de ses amphorismes.
La quatriesme rayson pour quoy l’en use des fruitz est pour faire descendre la viande du bout de l’estomac au fons d’iceluy. Et aucuns fruitz l’appessent et font descendre, par vertu de leur ponticité, dont dessus a esté parlé; et aucuns autres le font par la pesanteur et grosseur de leur substance, comme sont avellaines et chastaines, car ces deux fruitz n’ont de stipticité et ponticité, pour quoy ilz puissent serrer et faire descendre la viande, ne sont point aussy aromatiques, par quoy puissent conforter la bouche de l’estomac, mais ilz font devaller la viande par la pesanteur et grosseur de leur substance. Et telz fruitz ne sont gueres bons a soy conserver en santé, car ilz sont de dure digestion et sy engendrent mauvais humeurs. Et pour ce, dit Avicenne, que chastaignes n’ont point nourrissement louable pour gens, mais sont tres bonnes aux pourceaux, car ces deux fruitz n’ont point en eulx de doulcer, par laquelle elles soient agreables a l’estomac, ne sont aussy aromatiques et souef sentans, par quoy ilz puissent conforter l’estomac et esvertuer et nourrir les esperitz. Et, se ilz n’ont quelque stipticité et ranceur, de doulceur qu’ilz puissent fortifier la bouche de l’estomac, en assemblant et joignant les parties
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d’iceluy, et pour tant, ilz nuysent generallement a l’estomac et par especial a la bouche dudit estomac, car, par leur pesantur et froidure, ilz le blecent sans lui bailler aucune aide. Et les chastaignes sont de dure digestion et engendrent humeurs grosses et melencoliques, et si estoupent et oppillent les vaines, comme dit a esté. Mais les avelaines seiches nuysent moins et, si on les veult ung petit bruler, elles acquierent et prenent plus grant doulceur et stipticité que par avant. Et par ce, l’estomac se debilite en elles et d’elles est conforté, comme aussy les chastaignes, quant on les rostist, en sont plus stiptiques et plus doulces. Et ces chastaignes ainsy appointees, vallent mieulx apres la viande que celles que l’en cuit en eaue, que ceulx de Milan appellent serute.
Des noix et amandes, tant vertes que seches.
Les noix seches sont pires que les avelaynes, car elles sont moult unctueuses. Et par ce, se convertissent en colle et legierement font les gens enrouer; font aussy mal au chief et troublent les yeulx; et engendrent une tourneure de teste que aucuns appellent avertin. Et ce causent ses maulx, mesmement quant on les mangue en la fin du repas. Item user de nois seches, engendre paralisie en la langue et provocquant a vomir. Et pour tant, ceulx qui ont l’estomac colerique, se doyvent sou--verainement garder d’en mangier. Et de tant qu’elles sont plus vielles, font-elles plus de mal. Elles ont toutefvoies une bonne proprieté, car, si on les mangue avant autre viande, elles vallent contre venim, et mesmement contre le venim de poisons. On ne doit doncques
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[en] user si non es jours de poisson. Et lors, on les doit mangier a entree de table avec des figues et l’erbe appellee rue. Aucuns, touteffois, sont de oppinion qu’il est bon d’en user apres poisson, dient aussy qu’elles servent contre tous venims et mesmement contre la pestillence.
Les noix fresches et nouvelles font moins mal aux gens, car elles ne sont pas si unctueuses. Et pour tant, elles engendrent douleur au chief et tourneure de teste, comme font les seches et, par vertu de leur moisteur, laschent le ventre. Et, si on les vouloit ung petit rostir, qui touteffoiz n’est en comune coustume, et qu’on les mengeast a ffin de table, elles feroient descendre la viande. Et les seches prinses au commencement du repas avec figues et rue, servent contre le venim. Et par ce que dit est, je conclus que les noix seichent vallent pis aux gens que les vertez. Et au contraire, est des avelaines, car les seches sont meilleures que les vertes.
Au sourplus, nous devons savoir que les amandes sont moiennes entre les noix et les avelaines. Mais elles sont de meilleur nourrissement et plus amees a l’estomac et tiens que les vertes vallent mieulx a mengier que les seiches et vielles, car les fresches engressent la personne, actrempent la challeur desmesuree de l’estomac, deffendent l’omme de devenir yvre, confortent la veue, mondiffient la poictrine et oeuvrent les oppillacions et estouppement des costez. Et les ameres proprement purgent et nettoient les entrailles et accroissent la substance du cerveau, baillent aussy bon nourrissement et font dormir souef et doulcement. Ce fruit ycy doit doncques estre bien cher, car il fait de grans biens a la personne. Et les seichez ont en soy
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une ventuosité par quoy elles ne sont pas si bonnes que les fresches. Et devons noter diligement que le lait d’amandes seiches n’est bon a ceulx qui ont la fievre, par ce qu’elles [sont] trop unctueuses, par quoy il fait mal au chief et ce fait convenir en colle et legierement enflammer. Et en ce, pluseurs phisiciens errent. Mais le lait d’amandes vertes est plus convenable aux febricitans. Et, si par faulte des fres--ches, nous voulons faire lait des seches, lequel n’ait point de umctuosité, il fault premier rostir les amandes, puis les mettre en eaue bouillant. Apres, doyvent estre lavees en eaue froyde et puis broier et destremper de bonne eaue et saine. Et apres, l’en doit bien fort mouvoir son lait et oster diligentement l’escume qui demeure et lors, le lait sera bien unctueux.
Item nous devons savoir que, ja soyt ce que les amandes aient plusieurs bonnes proprietes, touteffoiz elles sont ennemies a l’estomac. Et aussy sont noix et avelaines. Et les amandes seches ne sont aulcunement bonnes avant la viande et apres, si non a deffendre que les vapeurs du vin ne montent au chief. Et pour tant, on dit qu’elles sont bonnes contre yvresse.
La cinquiesme cause pour quoy aucuns en bonne santé usent de fruitz, est neccessité et contrainte : est assavoir en faulte d’aultre viande. Et entre les fruitz moistres, les figues et les grappes de raysins bien meures, baillent meilleur et plus grant nourrissement. Et les autres, comme prunes, cerises, moures et aultres choses semblables, sont moins convenables au vivre de la personne. Item des fruitz aians habondance de jus, comme pommes, poires, cerises, moures
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et autres choses semblables, sont moins convenables au vivre de la personne. Item des fruitz aians habundance de jus, comme pommes, poyres et semblables, ne sont gueres pour soy nourrir, et mesmement en iver. Au sourplus, les avelaynes provocquent a vomissement, comme ont essaié aucuns aians bien fort estomac; nuysent aussy au chief et a l’estomac; mais elles confortent le foye et les avelaines ne sont pas sy chauldes que les noix, et si nourrissent plus fort. Et pour tant, dit Avicenne que les avelaynes sont bonnes et convenables a tous, de quelque condicion qu’ilz soyent et qu’elles engendrent bonnes humeurs.
Des pignolats.
Les grains de pin, entre les autres fruis rendans huille, nourrissent fort et si nourrissent les rains et les membres esperituelz. Mais ilz sont de dure et difficille digestion et sont ennemis contraires a l’estomac, comme dit a esté dessus, au chapitre de la garde de l’estomac.
Des dades.
Combien que Avicenne soit de oppinion que les dades soient moult apropriees a nature humaine, touteffoiz elles griefvent le chief et s’en engendrent grosses humeurs et visqueuses. Item elles estoupent et oppillent les voynes et le foye et sont de tres dure digestion. Touteffoiz, elles adoulcissent la poittrine et font bien crascher et si menguent et adoulcissent la tous.
Et ce tant pou souffise des fruitz.
Notes
[1] Erreur du copiste : vengende, corrigé dans le texte.
[2] Remplace cruz dans le texte.